Mobilier

Art et Immobilier : des marchés comparables ?

Introduction
Acquérir une oeuvre d’art serait gouverné par les émotions alors que l’achat immobilier serait davantage guidé par la raison. Pas si simple… A l’heure de l’ouverture de la Foire Internationale d’Art Contemporain (FIAC), Fabrice Larceneux, chercheur au CNRS se penche sur les parallèles entre le marché de l’art et celui de l’immobilier.

Qu’y a-t-il de commun entre le marché de l’art et celui  l’immobilier ? 

A priori, rien de spécial sauf que vendre un bien immobilier est parfois tout un art. Lorsqu’un collectionneur achète une œuvre d’art, il le fait d’abord par goût pour l’œuvre ou l’artiste. Un achat immobilier semble plus réfléchi avec une dimension patrimoniale et un objectif de rentabilité. A valeur monétaire égale, acheter une œuvre d’art serait gouverné par les émotions alors que l’achat immobilier serait davantage guidé par la raison.

« L’art et l’immobilier sont complémentaires. Le premier, a priori superflu, répond aux instincts d’élévation et de rêve ; le second à un besoin vital et nécessaire de protection et d’ancrage »,

Fabrice Larceneux, chercheur au CNRS

La réalité est plus complexe et ces deux marchés connaissent des fonctionnements assez similaires. Les économistes ont montré que l’art peut être considéré comme un placement, voire comme une valeur « refuge », et l’achat immobilier est souvent le résultat de coups de cœur qui déclenchent le désir d’achat. Plus encore, le marché de l’art et le marché de l’immobilier connaissent de véritables similitudes.

 

L’offre pré-existe à la demande

Elle est fixe et n’est pas construite sur les attentes des consommateurs comme c’est le cas dans les biens de consommation courante. Le bien doit être « poussé » tel qu’il est, ou un peu enjolivé, au consommateur.

 

Les biens comme les œuvres sont uniques

Les biens immobiliers et les œuvres d’art sont uniques et non directement reproductibles : on parle d’idiosyncrasie des biens. Et même lorsqu’ils sont identiques, comme les lithographies dans l’art ou les appartements standardisés dans l’immobilier, il existe des techniques pour ré-instaurer l’idiosyncrasie : les œuvres sont numérotées et signées, les appartements ont une orientation et des propositions de personnalisation uniques.

 

Galeristes et agents immobiliers définissent la valeur

La valeur des biens est définie par des intermédiaires : les galeristes et les agents immobiliers. Ils aident à définir la valeur du bien, à en faire la promotion (via des galeries/agences, des salons ou sur le net), à faire rencontrer l’offre (le propriétaire) et la demande (l’acheteur) en facilitant le processus d’achat. L’avènement d’Internet a favorisé l’émergence d’intermédiaires, « pure players », entre galeries et acheteurs (Artspers.com) ou directement entre artistes et acheteurs (Artmajeur.com), tout comme en immobilier.

 

Pas de marché unique de l’art ou de l’immobilier

Il n’existe pas un Marché unique, ni dans l’immobilier ni dans l’art. A l’inverse des biens standardisés de grande consommation, les deux domaines sont caractérisés par une multitude de petits marchés qui ont leur propre logique et fonctionnement : l’immobilier dépend de critères géographiques (le marché de Paris n’est comparable au marché de Perpignan, etc.), de critères de récence (le marché du neuf n’est pas le même que celui de l’ancien), de positionnement prix (le marché du luxe évolue de manière indépendante du marché classique), d’objectifs de l’acheteur (pour la location ou en résidence principale), etc.

La question cruciale est alors la définition d’un ensemble de biens réellement comparables. Par exemple, en partant de la recomposition de plus d’une cinquantaine de spécialités vendues dans les maisons de vente aux enchères, il existe non pas de un marché mais de 7 marchés de l’art bien spécifiques : les indicateurs moyens très agrégés des marchés ne sont donc pas toujours pertinents pour rendre compte de l’évolution des marchés.

L’art et l’immobilier peuvent ainsi apparaitre comme des marchés directement comparables gouvernés par des motivations de recherche de rentabilité et d’investissement patrimonial d’une part et par la recherche de plaisir, d’émotions positives et de distinction sociale d’autre part.

En fait, ces deux marchés sont plutôt complémentaires : l’immobilier, ancré dans la terre, répond à un besoin vital et nécessaire de protection et d’ancrage tandis que l’art, a priori superflu et sans utilité directe, répond aux instincts d’élévation et de rêve.

Retrouver dans l’immobilier la « poétique de l’espace » chère à Gaston Bachelard est le plus beau défi de demain, une poésie nécessaire et qu’on a parfois eu tendance à oublier dans l’immobilier.

 

Cf le « Journal de l’Agence »

Source : Larceneux F., Champavere G. (2013), The Seven art markets, AIMAC, Bogotta, 27-29 juin, Universidad de Los Andes, school of management.

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